avril 29, 2015

F Wall Street

L’activité de mon portefeuille ces dernières semaines est assez maigre. Les marchés me semblent haut, et je n’ai aucune idée suffisamment intéressante qui justifierait un achat. C’est dans ce genre d’occasion qu’à mon sens la force d’un investisseur dans la valeur se révèle : il est capable de ne pas succomber à l’euphorie des marchés et d’attendre encore des semaines, voire des mois qu’une opportunité se présente. C’est d’ailleurs un des nombreux messages que fait passer l’auteur de F Wall Street, ouvrage dont je viens d’achever la lecture entamée ces vacances, et dont je vous propose un résumé.

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F Wall Street est un livre pédagogique qui s’adresse essentiellement aux débutants, en leur donnant une trame assez complète d’une méthode qui a fait ses preuves, étayée de deux ou trois études de cas. Même si au final tous les aspects essentiels d’une bonne stratégie dans la valeur sont abordés, l’auteur a choisi de ne rester que dans un cadre bien précis : celui de la simplicité et de l’efficacité.

L’auteur, un ancien de Wall Street qui a quitté le système, écoeuré par son hypocrisie, entame son ouvrage par une dénonciation de l’absurdité du fonctionnement de Wall Street, dont finalement, le seul objectif n’est pas de faire gagner de l’argent aux investisseurs, mais aux banquiers. Et à ce sujet, il est vraiment convaincant ! Il embraye ainsi sur les gros pièges qui attendent l’investisseur néophyte et esquisse implicitement au fil des pages une approche orientée vers la valeur, simplement basée sur le bon sens.

Progressivement, l’auteur en arrive à la partie « un peu » technique du livre, où il explique, à partir de cas concrets très simples, la différence entre résultat et cash-flows libres (qu’il appelle owner earnings) et explique que seules les entreprises qui génèrent régulièrement du cash pourront prospérer. Cela lui permet, sans entrer dans des détails techniques comme l’étude d’un bilan ou d’un compte de résultat, de glisser naturellement vers l’élaboration d’une stratégie value basée sur l’actualisation des cash-flows, qui n’est qu’une variante de la méthode DCF. Cela reste simple, mais limpide : grosso modo, l’idée est toujours d’établir un flux de trésorerie moyen sur les cinq ou six dernières années, puis de l’actualiser au coût du capital. Là où j’attendais l’auteur, c’est bien évidemment sur l’estimation de ce coût du capital, qui est toujours le problème majeur dans ce type de méthode. La solution qu’il propose est assez surprenante : il conseille de prendre le taux correspondant à la performance souhaitée. Par exemple, si l’investisseur souhaite en moyenne que son portefeuille progresse de 15% par an, il devra dans ses estimations utiliser un coût du capital de 15%. A la réflexion, ce n’est pas si éloigné que ça de la définition du coût du capital. Car plus l’investisseur est exigent en termes de performance, plus son taux d’actualisation sera haut, et donc plus la valeur intrinsèque calculée sera faible. Ce qui lui procurera in fine une plus grande marge de sécurité. Et donc, probablement, un meilleur profit…

L’auteur développe ensuite la notion de CROIC, qu’il définit comme la rentabilité des capitaux investis par rapport aux flux de trésorerie générés. La stratégie d’investissement commence à se dessiner pour de bon, et à ce stade, elle peut se résumer en trois axes :

1. Calculer le CROIC sur plusieurs années. Celui-ci tendant à converger avec le taux de croissance de l’entreprise, il doit être assez stable dans le temps et plutôt élevé. Ne retenir que les entreprises dont le CROIC est supérieur à 15%.
2. Calculer les flux de trésorerie à partir d’une moyenne sur plusieurs années et les actualiser avec le coût du capital comme mentionné plus haut.
3. En tout bon investisseur dans la valeur, si le titre décote suffisamment sur sa valeur intrinsèque, il pourra être acquis. Le « suffisamment » étant apprécié notamment en fonction du CROIC, ainsi que d’autres éléments moins tangibles que je laisse au lecteur le soin de découvrir dans le livre.

Après cette grosse partie sur le calcul de la valeur intrinsèque, l’auteur aborde des parties plus générales de l’approche value, en dissertant sur la constitution du portefeuille et l’attitude à tenir au cours du temps. La psychologie de l’investisseur et des marchés reste en trame de fond et l’auteur s’appuie sur de nombreuses citations de Buffet. Il n’est donc pas étonnant de lire ce genre de conseils : « raisonnez comme un propriétaire de business ».

Le coeur de la stratégie ayant à ce stade largement été discuté, l’auteur propose rapidement quelques pistes de diversification, comme l’investissement dans les obligations, le short-selling, ou les stratégies d’arbitrage. Traitées à mon sens de manière superficielle, ces pistes n’ont pas nécessairement leur place dans ouvrage qui se veut à la portée de tous et cela contraste avec la première partie de ce livre.

Car je précise que la force de l’ouvrage est bien celle-ci: avec des mots simples et quelques exemples pertinents, les conseils prodigués par dizaines permettent aux investisseurs débutants (mais pas totalement néophytes), d’une part d’éviter de tomber dans les pièges classiques et d’autre part de commencer à investir avec une stratégie value efficace. Sa lecture, facile, peut décevoir certains théoriciens, ou lecteurs avides de techniques comptables ou mathématiques mais elle en fait un ouvrage de référence pour qui cherche une recette simple à comprendre et rapidement applicable.

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  1. Ce livre m’a l’air fort intéressant, je pense que ce sera mon prochain achat !

    Concernant la patience en bourse évoquée en début d’article, je n’aurais pas dit mieux ! La patience est le maître mot en trading, il est inutile de se précipiter sous peine de faire face à de lourdes pertes… Et ça, de nombreux traders (débutants) ont tendance à l’ignorer.

  2. Bonjour Boris,
    et merci pour ce résumé du livre de Joe Ponzio que je ne connaissais pas. Apparemment, Joe Ponzio aurait perdu la quasi-totalité de l’argent confié à son conseiller financier avant de se décider à se lancer dans le value investing. Ca explique peut etre pourquoi il a une « dent » contre le système (il y a de quoi)
    A bientôt
    Tanguy

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