Comme je l’expliquais dans plusieurs de mes derniers rapports mensuels (et newsletters), j’ai peu à peu constitué une ligne d’obligations Vanguard, une petite compagnie pétrolière et gazière américaine. Le gros de ma ligne a été accumulé à de niveaux de cours extrêmement faibles. Les raisons qui m’ont poussé à acheter de ces obligations sont très simples : à environ 11% du pair, et avec un coupon de 7,885%, le rendement facial est de près de 72% et le Yield To Maturiry est de 93,21%. En d’autres termes, si les coupons sont versés jusqu’à l’échéance (avril 2020), chaque année, je recevrai à peu près le même montant que ce que j’ai investi. Ça laisse rêveur… Mais il y a une condition : il faut que les coupons soient réellement versés et que le capital soit réellement remboursé. Et compte tenu des cours actuels du pétrole, l’incertitude est profonde. Pour le marché, même les prochains coupons ne seront pas versés. Il m’était difficile de me prononcer de manière définitive sur la question jusqu’à la publication des résultats annuels, intégrant pour la première fois les sociétés LRR Energy et Rock Energy Partners, acquises en 2015.
Grâce à ces acquisitions, les capacités de production de Vanguard ont augmenté au quatrième trimestre 2015. Logiquement, on devrait s’attendre en 2016 à un boom de la production du groupe. Mais au vu des cours du pétrole, et donc des pertes enregistrées en 2015, le management a annoncé des mesures d’économie drastiques, qui vont entraîner une baisse sensible de la production (entre 10% et 15% par rapport à fin 2015). Ainsi, en tenant compte d’une diminution par deux des dépenses de maintenance, de la légère baisse des intérêts, et des couvertures, les estimations de la direction (que je pense assez fiables) donnent un free cash-flow de 190 millions de dollars pour 2016 (à comparer à 165 millions en 2015). Il n’y a pas de projection pour 2017, mais les taux de couverture étant moins élevés qu’en 2016, il est envisageable, si les cours restent bas, d’avoir un cash-flow bien inférieur, voire négatif.
Quoi qu’il en soit, le paiement des coupons pour 2016 et dans une moindre mesure ceux de 2017 semblent assurés… Cependant, une petite note dans le rapport annuel introduit une incertitude.
Tout d’abord, je vous propose un petit rappel du fonctionnement du crédit destiné aux compagnies pétrolières (et gazières). Les prêts consentis par les banques sont garantis par les actifs (les réserves prouvées). Or, les cours de ceux-ci étant très volatils, le collatéral dont disposent les banques est sujet à de fortes variations. C’est pourquoi deux fois par an, généralement au printemps et à l’automne, la valeur de ces actifs est réévaluée sur la base de prix du pétrole ou de gaz futurs. Noter que dans cette réévaluation, les réserves prouvées non développées peuvent n’être prises en compte qu’au quart de leur valeur. Les banques prêtent environ 60% de cette évaluation, et peuvent aller au-delà sous certaines conditions, en particulier si la production est couverte.
Dans la situation actuelle de cours du pétrole et du gaz en forte baisse, il faut s’attendre à ce que les réévaluations soient bien inférieures à celles effectuées à l’automne 2015 et qu’en conséquence, les banques exigent des compagnies pétrolières un remboursement d’une partie du prêt. En général, le délai de remboursement est de six mois.
Dans le cas de Vanguard, la situation est tendue, car la réserve de crédit accordée par les banques est quasiment épuisée (il ne reste plus que 100 millions de dollars contre une base de 1,78 milliards), suite aux deux acquisitions effectuées en 2015. En prévision d’une réévaluation défavorable en avril, le groupe a entamé des négociations en vue de vendre rapidement une petite partie de ses actifs. Il est impossible à l’heure actuelle de dire si cette vente compensera le montant exigé par la banque. A titre indicatif, l’entreprise annonce une valorisation de ses réserves prouvées à 1,7 milliards de dollars (dont 72% sont développées et 68% sont du gaz) calculés à des niveaux de cours du pétrole et du gaz assez proches de ceux actuels.
Conclusion. J’ignore totalement les prévisions des cours que sortiront les banquiers, mais il convient d’être prudent. Le fait que les dividendes des actions ordinaires et préférentielles vont être coupées, combiné avec un cash-flow largement positif en 2016 (grâce à la stratégie de couverture) sont des arguments qui permettent de garder une certaine confiance. Le management ne se prononce pas quant au montant probable exigé par les banques, mais ne semble pas très inquiet par la situation. Mais pour ma part, avec ces nouveaux éléments, j’ai décidé de ne pas renforcer ma ligne tant que je n’aurai pas plus d’informations sur les prix futurs utilisés par les banquiers. Je serai fixé en avril.
Bonjour Boris,
C’est Sovanna Sek du blog Investir En Actions.
Il faut espérer que les cours du pétrole remontent puis se stabilisent pour que les compagnies du shale oil puissent sauver leur face pendant quelques temps.
Normalement, avril est un des mois de réévaluation. Si tu veux en savoir plus sur la baisse du prix du pétrole depuis fin 2014, cette article pourrait t’éclairer :
http://www.investir-en-actions.com/5-images-pour-comprendre-la-baisse-du-prix-du-petrole/
Par ailleurs, je pense que l’Arabie Saoudite n’a pas l’intention de se faire piquer ses parts de marché.
Cordialement.
Bonjour Boris,
Juste un petit mot pour signaler que nous attendons avec impatience la suite des articles et reportings.
Au plaisir de vous lire de nouveau!
Bonjour Boris,
Vous reverra-t-on sur le blog ?
Cdt,
Bonjour,
oui, je n’ai aucunement l’intention de laisser tomber ce blog, c’est même le contraire. Aussi me sens-je tout honteux de ne point donner de nouvelles ces derniers mois.
Je me suis lancé il y a un dans un nouvelle aventure. Après avoir été investisseur passif en bourse, puis investisseur-entrepreneur en immobilier, me voici désormais entrepreneur tout court. J’ai en effet récemment finalisé la création de mon entreprise; ce qui a accaparé tout mon temps jusqu’à maintenant. J’espère pouvoir revenir sur le blog en force cet automne.
En attendant, vous pourrez suivre mon aventure sur http://www.nukoro.com, où comme tout investisseur, je ne doute pas que ne succombiez pas aux charmes de l’art tribal.
Concernant Vanguard, les nouvelles sont mi-figue mi-raisin. La société a dû rembourser une partie de son crédit, comme elle l’avait mentionné. Mais cela ne l’empêchera pas de payer ses coupons 2016. Je suis très confiant également pour 2017.
Si le cours continue de monter en flèche comme jusqu’à maintenant, il n’est pas impossible que je m’allège à l’approche des 50%, pour arbitrer vers des dossiers tout aussi rémunérateurs, mais bien moins risqués (à ce cours-là).
A très bientôt, et merci pour vos encouragements.
Boris