juin 21, 2023

Interview de Youssef, cofondateur de MasterBourse – Partie III

Cet article est la suite de la première partie et de la deuxième partie.

J’ai eu le grand plaisir de m’entretenir longuement avec Youssef, cofondateur de MasterBourse. Pendant pas moins de trois heures, cet investisseur pédagogue a raconté son histoire et comment il a bâti sa stratégie de long terme. Le texte issu de cet entretien étant très long, j’ai préféré le couper en trois articles, et de surcroît, en proposer une version en podcast. J’espère que vous prendrez autant de plaisir à le lire (ou l’écouter) que j’en ai pris à l’interviewer.

Vous pouvez écouter les extraits directement à partir d’ici :

Master Bourse

Boris

Parlons un peu de Master Bourse. Tu n’es pas seul pour faire tout ça, vous êtes plusieurs ?

Youssef

Oui, nous sommes deux amis d’enfance, qui se suivent depuis le lycée. Nous avons fait l’EM Lyon ensemble et forcément avec les années, et même les décennies, Nous avons commencé à nous auto influencer. C’était évident que nous allions lancer quelque chose ensemble et c’était évident que ça allait être autour de la bourse, notre passion commune.

Boris

Et l’idée, ce n’était pas originellement de faire un produit et d’en vivre, c’était déjà de se faire plaisir, de parler de la bourse et puis éventuellement, après, de construire quelque chose qui pourrait vous rapporter éventuellement, c’est ça aussi ?

Youssef

Oui, nous sommes passionnés de bourse depuis nos 18 ans. Nous avons lancé Master Bourse en 2019, c’est à dire il y a trois ans. Au début, c’était juste un moyen de présenter nos idées et de formaliser nos discussions. Nous avions des fiches – d’ailleurs Master Bourse a commencé avec les fiches. Nous rédigions des fiches pour nous, des fiches de suivi, sous Excel et y notions nos remarques. Et puis à un moment, nous nous sommes dit que ces fiches pourraient servir un plus grand nombre. Et nous avons essayé de mettre ça dans une forme facile à lire.
Donc en effet, au début nous n’avions pas d’idée claire de ce que nous souhaitions faire. Nous voulions juste parler de notre passion. Le business model est venu un peu de ce que nous observions vu sur le marché et des demandes de nos abonnés.

Le club Master Bourse

Boris

Ok, maintenant on en revient au club proprement dit, donc tu as expliqué qu’en fait tu avais ressenti un besoin de la part des abonnés à ta newsletter. Au fur et à mesure, ils t’ont posé des questions. Tu as l’impression qu’il y a une dynamique qui s’est formée et tu as voulu regrouper tout ça au sein d’un club, c’est ça ?

Youssef

C’est ça. Au début, on a commencé avec les résumés et après on a eu pas mal d’abonnés qui nous disaient avoir déjà lu tous les livres qu’on leur citait et que cela ne les intéressait pas, mais qu’en revanche ils étaient prêts à payer pour plus de contenu, notamment un club dans lequel on discuterait par exemple du portefeuille de Master Bourse à partir de questions comme pourquoi avez-vous acheté ça ? Vendu ça ?
D’un côté nous nous sommes dit que si à la base les concepts d’avantage concurrentiel ou l’avantage d’une entreprise capex light ou comment on peut être très rentable avec une marge opérationnelle de 2% – si ces concepts – ne sont pas très clairs, on ne peut pas avoir un club intéressant. Nous avons donc souhaité mettre en place une formation. Ce qui nous a freinés au début, c’était qu’on voyait plein de formations Youtube vendues par des gens à Dubaï qui se lançaient. Mais contrairement à eux, nous allions monter un club dans lequel il allait y avoir un suivi des thèses d’investissement, on allait parler de marché, montrer la qualité, etc. avec l’objectif d’apporter un côté pratique à la formation. Par exemple, quand on parlerait d’avantage concurrentiel on irait prendre une entreprise en expliquant où se situe son avantage concurrentiel et comment il se manifeste. Il y a des gens qui veulent apprendre à investir et d’autres qui préfèrent suivre des thèses d’investissement. Et là, avec le club, on a tout.

Boris

Vous avez de l’ambition sur ce club ? Vous pensez que ça peut aller très loin ? D’ailleurs, souhaitez-vous que ça aille très loin ?

Youssef

On veut que Master Bourse soit économiquement viable mais ça va prendre beaucoup de temps car on ne veut pas non plus d’une usine à gaz. Dans ce club, pendant trois jours avant chaque webinaire, les membres peuvent poser toutes les questions qu’ils souhaitent en rapport à n’importe quelle entreprise ou marché. Donc si j’ai mille abonnés qui chacun pose deux questions avant chaque webinaire, je vais me retrouver avec deux mille commentaires chaque une semaine, ce qui nuira nécessairement à la qualité et la pérennité. Donc nous ne pouvons pas élargir le club à beaucoup de monde.
C’est un club dans lequel on propose aux gens d’apprendre à investir en bourse. On y étudie ce qui fait la qualité d’une entreprise, comment faire un diagnostic de A à Z complet, comment valoriser l’entreprise, comment mettre des stratégies en place… Et derrière nous organisons des webinaires sur le marché, sur la vie des entreprises, sur les thématiques, sur des entreprises intéressantes, des publications intéressantes, le feedback des réunions, le feedback des événements, etc. C’est un club où on privilégie l’interaction. Que ce soit avant le webinaire, pendant le webinaire et après le webinaire.

Boris

Tu fais des interviews formidables, j’ai vraiment adoré celles de Sébastien Faitjean et Louis de Fels. Y en aura-t-il d’autres ?

Youssef

Oui, il y en aura d’autres. Plein d’autres, même. Pour tout te dire, comme on vient de lancer le club, je suis à fond sur ça en essayant de proposer une qualité maximale et m’assurer que tout le monde est satisfait, et après je vais avoir pas mal de temps disponible pour développer d’autres choses justement, comme les interviews, les newsletters (beaucoup, beaucoup plus de newsletter) et la chaîne de Master Bourse en général.

Boris

Donc Twitter, Master Bourse, la newsletter, le club… Il y a de quoi être fier de cette notoriété que tu as acquise. Que retires- tu de tout ce travail ?

Youssef

Je suis fier, oui, je ne m’y attendais pas, mais je suis surtout très heureux parce que ça m’a été extrêmement bénéfique. Je ne parle pas du côté financier. Si aujourd’hui on est ensemble et qu’on discute, c’est parce que j’étais visible à un moment sur Internet. Ce que je fais aujourd’hui, c’est ce que je faisais déjà il y a cinq et dix ans, mais je le faisais dans mon coin. Et grâce à Master Bourse, j’ai commencé à tisser un réseau qui est aujourd’hui mon plus bel actif – en termes professionnels. Ce n’est pas pareil quand on est dans son coin. C’est vraiment ça, que je retire le plus de l’aventure de Master Bourse à ce stade. Et je pense que ça va continuer parce qu’aujourd’hui on m’invite à des événements pour les institutionnels. Un PDG ou un organisateur d’un événement, pour peut-être avoir une place, aujourd’hui viennent me voir pour me proposer ça. Donc mon bénéfice de tout ça, c’est vraiment le réseau.

Une stratégie réplicable

Boris

A l’instar de Master Bourse, ce blog a vocation pédagogique. J’aimerais éventuellement tu puisses t’exprimer sur des conseils à donner aux débutants. Par exemple, penses-tu que ta stratégie puisse être appliquée par tous ? J’ai compris que ta stratégie est basée sur les fondamentaux et le momentum. Donc d’après toi est-ce une stratégie que n’importe qui peut appliquer ou est-ce vraiment trop particulier ?

Youssef

Je pense que ma stratégie peut être appliquée. Sincèrement je ne lancerais pas le club Master  Bourse si je croyais le contraire. En revanche, je pense que mon portefeuille ne l’est pas. Parce que je réalise régulièrement des arbitrages. Je peux vendre Neurones à 10 fois le résultat opérationnel et racheter peut-être trois mois après, à 8 fois le résultat opérationnel. Pas l’intégralité de ma ligne bien sûr, mais en tout cas en partie. Alors c’est possible parce que je suis tout le temps devant l’écran et que j’ai le temps de le faire, et la passion pour le faire. Il y a des gens qui sont comme moi, mais qui ne veulent pas jouer à ce jeu pour gratter 10%.
Donc sur la stratégie, acheter des actions à un bon prix en fonction de leur qualité et avec un bon momentum, je pense que c’est réplicable. Tu vois bien d’ailleurs les indicateurs de momentum que je suis : c’est juste regarder la courbe du cours à l’œil nu !

Boris

Tu viens de dire une chose sur laquelle j’aimerais rebondir : tu « avoues » faire du trading. Tu achètes et tu en vends plusieurs fois dans la même année un même titre. Tu peux préciser ?

Youssef

Oui, il y a des positions fortes, solides de long terme que je peux alléger au renforcer en fonction des multiples et ça me permet sur ces actions – alors pas toutes, et pas toujours – de gagner 20% voire 30% sur une ligne qui fait 10% et je l’assume. Je sais que certains investisseurs veulent vraiment marquer cet esprit de propriété d’une part de l’entreprise et se refusent à bouger contre vents et marées. Moi, j’essaie d’être très neutre, de couper mes émotions par rapport aux actions. Et vraiment si une de mes lignes atteint un prix élevé, je l’allège un peu. Je ne peux pas, faire ça sur toutes les actions, mais sur les plus stables, les plus prévisibles, c’est parfaitement possible.

Boris

Ne trouves-tu pas qu’il y a une part de snobisme de beaucoup d’investisseurs à dire « moi j’investis seulement sur le long terme et je ne m’autorise pas à faire du trading pour grignoter quelques pour pourcent » ?

Youssef

Chez certains, il y a une idée d’arrogance derrière : « toi, tu n’as pas compris la valeur de cette entreprise ». Si. Moi, j’estime que j’ai bien compris la valeur de cette entreprise, mais ce n’est pas un membre de ma famille. Il faut vraiment dissocier sentiment et opportunités et tant qu’on peut faire optimiser son gain, il faut le faire. Après, il faut vraiment faire ses devoirs, s’auto -évaluer et déterminer factuellement si c’était  a posteriori une bonne chose de le faire. Tous les ans je me plie à ce petit jeu en sortant tous les mouvements de chaque position, et vois combien la position a fait. Et je vois si mes allers-retours ont payé ou pas chaque année. Et si je vois que ça ne paie plus, j’arrêterai de faire ça pour faire autre chose. Par exemple, pour Neurones, j’ai toujours fait ça et ça a toujours été payant. En 2020 le cours a bondi de 61%. J’ai raté une partie de la hausse parce que j’ai allégé avant. Mais ce n’est pas grave, si je fais le solde sur cinq ou sept ans, le solde est largement positif.

Plastivaloire

Boris

Donc en fait, tu appliques une dose de pragmatisme sur tes lignes. Tu restes long terme mais d’un côté ça ne t’empêche pas d’optimiser un peu au cours de l’année en fonction des mouvements du cours.

Youssef

Exactement.

Boris
Tu as dit que cela ne te dérangeait pas d’investir dans des valeurs de qualité moindre, ce qui me surprend parce que je pensais que tu étais exclusivement dans le qualitatif. Peux- tu donner un exemple ?

Youssef

Tout à l’heure, je te parlais d’Akwel, qui a commencé à réagir positivement face à une mauvaise publication. Puis, on a eu Faurecia et Plastic Omnium. On a pu constater que les mauvaises publications dans le secteur étaient bien accueillies et donc que le marché réagissait comme s’il avait touché le fond – en tout cas à court terme. Deux semaines avant la publication de Plastivaloire, j’observe que tout le secteur est porté. Les constructeurs disent que les volumes sont de retour. A ce moment-là, pour le coup, je fais du trading de news et j’achète Plastivaloire, qui a bien chuté mais sans spéculation avant. J’en achète vraiment, mais sur une taille réduite de mon portefeuille, à un prix qui représente fidèlement – je ne vais pas dire la médiocrité du business, mais disons – la moins bonne qualité. La publication est bien accueillie et l’action a pris 25%. Alors j’ai vendu une grosse partie de ma ligne et je garde aujourd’hui une petite ligne qui est constituée de 100% de cette plus-value faite en deux semaines. Je veux continuer de suivre Plastivaloire parce que globalement, on a 80 M€ de capitalisation, un actif courant qui dépasse légèrement le passif courant et 80 M€ de dettes à court terme à payer. S’ils arrivent à payer la dette à court terme, c’est potentiellement un fois deux à valeur d’entreprise constante. Mais ça, c’est la théorie. S’il y a le moindre accident, c’est un refinancement, avec 80M€ à payer cette année dans d’autres conditions (des taux punitifs). Je ne veux pas prendre ce risque sur mon capital. En revanche avec une position ayant un PRU de zéro, oui, je garde. Et la première chose que je regarderai à la prochaine publication des comptes annuels, c’est voir comment elle a géré ces 80 M€. Dans mon portefeuille il y a LVMH et… Plastivaloire !

Les erreurs de débutant

Boris

Est-ce que tu peux citer des erreurs classiques de débutant que tu conseillerais qu’ils évitent quand même de faire ?

Youssef
Pour moi, il y a deux sortes de débutants. Il y a le débutant qui commence par l’analyse technique et qui, à peine a-t-il essayé l’analyse fondamentale, va se dire que c’est trop compliqué, que ce n’est pas pour lui et va donc rester sur les graphes. Je trouve vraiment dommage qu’on ne s’intéresse pas à l’entreprise sous prétexte que l’analyse fondamentale d’une entreprise est difficile ou ne paye pas toujours et qu’on finisse par arrêter de réfléchir. Il faut toujours réfléchir et se poser des questions.
Et il y a le débutant qui commence sur la bonne voie en lisant des blogs et les livres de Warren Buffett. Son erreur à lui est de se focaliser sur la valorisation d’une entreprise ou même sur sa qualité et d’oublier le momentum en renforçant à la baisse. Je pense qu’il ne faut pas renforcer à la baisse. Je reviens toujours à cette erreur car c’est une vraiment une erreur de débutant qui continue de nous suivre toute notre vie. Mais dès qu’on est débutant, il faut commencer à travailler dessus. Il vaut mieux pyramider que moyenner à la baisse.

Une autre erreur de débutant, c’est de copier les autres. Je pense qu’on est aussi influencé par tel ou tel investisseur, tel gérant et tout ça, et donc qu’on le copie. Mais lui, il a ses propres raisons, son propre raisonnement. Il peut se tromper aussi. Donc ce n’est pas évident parce que d’un côté c’est une source d’apprentissage et d’inspiration et d’un autre côté on dit qu’il ne faut pas les copier.

La troisième erreur de débutant concerne la diversification. Il faut diversifier. Je sais que c’est une question qui divise la communauté, même chez les très bons investisseurs, mais je ne vois pas de bonne justification de la concentration. En dix ou quinze ans, ma première ligne n’a jamais surperformé les autres. Cela a toujours été une ligne au milieu du portefeuille qui a enregistré la meilleure performance. Rien que ça, ça en dit long sur la concentration. N’oublions pas que le monde est incertain : tout récemment on a eu la COVID, et on a eu une guerre. On ne sait jamais comment, directement ou indirectement, une entreprise peut être touchée. Ainsi, quand on a un tiers ou la moitié de son portefeuille sur une action – même très solide ou tout ce qu’on veut – si on met cinq ans pour rattraper une forte baisse, c’est quand-même cinq ans pendant lesquels on ne gagne rien. Aussi, je concentrerais mon portefeuille sur les quatre premières valeurs et non sur une seule, même si je ne profiterai pas complètement d’une possible surperformance de cette cinquième idée par rapport aux autres. Et puis, on peut connaître une dizaine d’entreprises. J’ai un portefeuille de dix ou quinze lignes. C’est gérable pour un particulier, même s’il a un travail à côté.

Et le dernier conseil, c’est opter pour la stratégie qui donne envie de continuer tous les jours à lire et apprendre sur la bourse. Ce n’est pas parce que untel a gagné 30% par an sur vingt ans avec cette stratégie qu’elle est faite pour vous ou qu’elle va faire 30% avec vous. En fait je suis convaincu que la meilleure stratégie c’est celle qui allie un raisonnement, ou une logique business à votre psychologie, votre tempérament et vos centres d’intérêts. Je vois par exemple des gens qui sont très axés sur l’innovation, et qui vont aller chercher des entreprises dans la tech (voire au NASDAQ) et qui s’en sortent très bien. Mais c’est leur passé, c’est ce qui les fait vibrer et à force d’être passionné, de chercher tout ça, ils parviennent à comprendre certaines dynamiques que la plupart des investisseurs ne comprennent pas. D’autres cherchent la rareté, la tradition, le qui vend plus, ou optent pour des industries peu discutées, comme le vin ou le luxe, toutes ces industries où depuis un siècle, on fait la même la même chose, de la même manière et il y a de fortes chances qu’au cours des cinquante prochaines années on fasse la même chose de la même manière. Il y en a pour tout le monde et il faut trouver ses centres d’intérêt pour pouvoir tenir une course d’une vie.

Être curieux

Boris

Penses-tu qu’il faille avoir un profil particulier pour être un bon investisseur ?

Youssef
Curieux. Les bons investisseurs que je connais sont tous curieux. C’est vraiment le caractère commun à tous ces investisseurs. On pourrait penser par exemple à l’humilité, mais il y a des investisseurs pas humbles qui performent très bien, et il y a des investisseurs humbles qui malheureusement perdent. Donc l’humilité est peut-être très bonne qualité humaine, mais elle ne garantit pas le succès en bourse. En revanche, ceux que je vois gagner régulièrement sont tout le temps en train de poser des questions, chercher, creuser… Parfois, on dit qu’ils en font trop. Mais non, pour moi, ils bossent leur dossier, c’est très bien. Ça rejoint aussi ce côté où un intérêt intellectuel est nécessaire pour que la passion perdure.

Commencer sans capital

Boris

Est-ce qu’on peut commencer sans capital ?

Youssef

Non. Non. Non, il ne faut pas se leurrer. Moi je fais partie de l’école qui croit à l’immobilier. En vrai, on a trente ans de vie d’investisseur actif parce qu’au début on n’a pas un emploi ou on n’a pas le capital où on n’est pas finançable. Et à partir de 60 – 65 ans c’est pareil, il y a d’autres portes qui se ferment. On passe peut-être plus à une stratégie de conservation, mais pour construire un capital, on a une fenêtre très réduite et dans ce cas-là, pour moi c’est évident qu’il faut pousser le levier à son maximum pour mettre toutes les chances de son côté. En gros, pour moi, il y a trois leviers en fait, en plus du travail salarial, c’est l’immobilier, la Bourse et l’entrepreneuriat. Un petit business à côté demande du temps, mais idéalement il faut pousser les trois. Et si on ne peut pas pousser les trois parce qu’on n’a pas le temps – ce qui se comprend aussi – au moins avoir de l’immobilier et de la bourse. L’effet de levier sur l’immobilier est monumental. Ce qui me fait vivre aujourd’hui, c’est l’immobilier. Quand on commence de zéro pour avoir un capital rapidement, le levier c’est l’immobilier. Et je dirais même l’achat-vente : acheter un appartement, le retaper, et le revendre deux ou trois ans plus tard. Mais en tout cas, l’immobilier pour constituer un capital et la bourse pour l’accélérer en parallèle.
Concrètement j’allais chez le banquier, je lui expliquais pouvoir mettre 50 k€ ou 100 k€ en apport pour un bien, mais aussi pouvoir ouvrir un compte-titres chez lui et acquérir un bien qui s’autofinance. En lui montrant le loyer du quartier, le prix de vente, les travaux etc. je lui prouvais qu’il pouvait le financer à 100% à crédit, rendant tout le monde gagnant, lui y compris car en plus d’avoir un crédit, il allait ouvrir un compte-titres et remplir son objectif commercial. De plus, c’est moins risqué pour lui car en cas d’impayé, je prendrai sur mon compte-titres pour rembourser le crédit. Alors que si je l’investis en apport pour ce bien, je n’aurai plus de trésorerie pour rembourser les mensualités en cas de problème. On coche donc quatre ou cinq cases d’un coup. C’est moins risqué.
Ainsi, on fait rentrer de l’épargne car on dispose désormais de 50 k€ qui, au lieu d’être immobilisés dans de la pierre, sont déposés sur un compte-titres qui travaille.

Cela étant, il y a des stratégies à mettre en place et on voit comment on peut continuer, profiter de l’effet de levier de la dette tout en grossissant le portefeuille. Il faut se retrousser les manches, il faut bosser. Et après, on peut lever le pied et quitte à un moment liquider son l’immobilier et rester 100% en bourse.

Lectures recommandées

Boris

Est-ce que tu peux donner quelques lectures que tu conseillerais aux débutants ?

Youssef
 Il y a les classiques, bien sûr, mais je ne vais pas parler de Peter Lynch ni même Phil Fisher parce qu’ils sont très présents en bourse. Je préfère actualiser la liste et parler de Quality Investing par exemple. J’aime beaucoup ce livre. Ce n’est pas uniquement pour investir dans des entreprises de qualité, car c’est plus généralement pour comprendre pourquoi des entreprises continuent de bien progresser et d’autres non. Malheureusement, il n’est disponible qu’en anglais.
Il y a le livre de Pat Dorsay sur les avantages concurrentiels. Ça c’est un impératif. Et je trouve que c’est vraiment sous-coté, il n’a pas la publicité qu’il mérite.
Je peux citer The Dhandho Investor et Quality Shareholders également.

Boris
Tu parlais celui de Livermore, aussi.

Youssef
Oui, les Mémoires d’un spéculateur. C’est un petit livre qui ne coûte qu’une quinzaine d’euros.
Moi j’aime bien aujourd’hui aller voir, sortir de cette référence par rapport à Benjamin Graham et tout ça – que j’adore et que j’applique – pour me laisser surprendre ou au contraire critiquer. Un livre sur tout autre chose, sur le trading ou sur une façon très différente d’investir ne laisse pas indifférent. Et je trouve que c’est plus riche comme expérience que de lire un énième livre sur le value investing.

Les winners pour 2023

Boris

Tu peux nous donner tes winners pour 2023 ?

Youssef

Écoute, je commence l’année très mal. J’ai écrit une très belle note sur TFF et j’en ai acheté à 43 € il y a deux ou trois jours. Je dois déjà être à -6% ! Donc les winners pour 2023, je ne sais pas…
Mais je crois toujours à groupe Crit. À un moment, il va se passer quelque chose. Ce cours n’est pas normal.
Je pense aussi peut être à Bassac car s’il y a un pari à prendre c’est bien celui de l’accalmie sur les taux d’intérêt. Et finalement un retour sur ces acteurs qu’on a peut-être un peu trop massacrés.
Je suis un peu mal à l’aise avec les valorisations actuelles où je ne trouve pas d’opportunité franche. Les ESN sont bien valorisées. Les valeurs de croissance, elles aussi, sont bien valorisées. Pour les valeurs cycliques, rien ne nous dit que le cycle va réellement se retourner, et finalement depuis septembre on a pris 30% ou 50% sur certaines boîtes. Donc aujourd’hui je regarde la cote, et je me dis que Bassac, qui est un peu en retard sur un secteur où on a acté une crise grave peut être un bon pari. Et Crit, parce qu’elle ne réagit pas – elle ne réagit pas depuis cinq ans alors que le cash continue de s’accumuler – et qu’il y a du mouvement dans le capital du-dessus, dans les holdings. Donc peut-être qu’on aura une bonne surprise, comme un dividende ou exceptionnel ou une OPA. C’est quand même à un cours stupide.

Twitter

Boris

Qu’est-ce que tu penses de Twitter pour la bourse ?
Youssef
Alors c’est toujours mon réseau social favori. Je préfère Twitter à Facebook ou Instagram et je pense que s’il y a un réseau à garder, c’est bien Twitter. Finalement, j’ai l’impression qu’un nouveau venu sur Twitter va passer de déception en déception, jusqu’à peut-être identifier les bonnes personnes à suivre et finalement commencer à apprécier cette liste réduite. Donc c’est une jungle, mais on peut y trouver de la valeur à condition d’y passer du temps et d’accepter quelques déceptions. Surtout pour un nouveau venu.

Un mot sur les cryptos ?

Boris

Est-ce que tu as envie de commenter ce qu’il s’est passé sur les cryptos et la faillite de FTX ?
Youssef

Je pense, qu’on verra ça encore et encore. Le plus frustrant dans tout ça, c’est que je ne suis même pas sûr qu’on va en tirer des enseignements et que ça va vacciner certains à la spéculation sauvage. Peut-être que ça va être traité très superficiellement, et les gens de se dire que c’est un escroc. Et puis c’est tout. On passera à autre chose sans réfléchir un peu plus en profondeur. Donc finalement je ne suis même pas sûr que ça va servir à quelque chose. On voit déjà des gens qui qui commencent à reparler de Bitcoin sur les réseaux sociaux, que ça résiste et qui pensent que le fond du problème est juste une histoire d’une personne, d’un escroc. C’est ça que l’histoire retiendra et c’est dommage.

Le mot de la fin

Boris

Est-ce que tu as quelque chose à ajouter ? Le mot de la fin ?

Youssef

Le mot de la fin c’est un peu ce que j’ai dit tout à l’heure par rapport au conseil pour les débutants. Vraiment, c’est indispensable, formez-vous. Il y a beaucoup de contenus gratuits sur Internet. D’excellents livres à 20 € ou 15 € également. Formez-vous parce que votre fenêtre de tir pour constituer un capital est étroite, et ce serait dommage de tenter des choses pour se rendre compte à cinq ou dix ans plus tard qu’elles ne marchent pas. Alors qu’on aurait pu justement se former rapidement et capitaliser sur la connaissance de certaines entreprises ou certains secteurs. Donc lancez-vous aussi parce que c’est bien beau d’avoir des performances sur des comptes virtuels ou alors de commencer petit avec quelques milliers d’euros, et ne jamais faire progresser ça parce que on l’a pas pris sérieusement ce petit compte PEA. Donc, c’est une discipline où le travail ne paiera pas forcément chaque mois car ce n’est pas une ligne droite. Mais ceux qui ont réussi ont travaillé. Parce qu’on peut avoir un coup de bol, mais on n’en aura pas dix ou vingt dans une vie. Donc à un moment, le travail finit par payer. Et puis lisez. Lisez des blogs comme valeurbourse, parce que moi j’ai appris des choses et gagné de l’argent avec ce blog.

 

 

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